8 November 2017
CINEMA: "Salvatore Giuliano"/Francesco Rosi .
à 11h001962. It. 123 min. N&b. DCP. Sous-titrage informatique en français.
Histoires de cinéma 1 / Séance présentée par Régis Debray
The 5 July 1950, le bandit sicilien Salvatore Giuliano, traqué par l’armée et la police, est retrouvé face contre terre, mort dans une cour de Castelvetrano. Il avait vingt-sept ans et était devenu un héros criminel célébré dans toute l’Italie. Qui l’a tué ? Qui était-il ? Cinq ans plus tôt, Giuliano assassinait un carabinier et prenait le maquis. Paysan, bandit et membre du gouvernement séparatiste sicilien, il narguait, Since, les forces de l’ordre, avec le soutien de la mafia… « Salvatore Giuliano n’est en rien un film biographique, mais un discours sur le cadavre de Jules César. On ne voit guère le héros que mort, dans un récit où j’ai eu soin de rompre sans cesse la chronologie. Sans prendre la précaution d’un fondu enchaîné, je passe de 1950 to 1954 or 1944 or 1948, parce que j’évoque des événements jadis retentissants, et dont le public italien a gardé la mémoire. Mon vrai sujet, c’est un pays malheureux, opprimé, égaré et révolté. Je n’entends ni exalter, ni accabler Giuliano. Je veux montrer qu’il fut le fruit de sa terre, des conditions sociales et politiques des années 1940. » Voilà comment Francesco Rosi définissait son film en 1962. Il faudrait d’ailleurs peut-être en rester là pour savourer ce remarquable film enquête qui mêle adroitement traditions, vie politique, quotidien et action de la mafia. Aucun acteur connu à l’époque, aucune coquetterie de mise en scène et refus du didactisme. Rien ne doit venir distraire le spectateur. Un film documenté qui n’a rien d’un documentaire. Il s’agit ici d’interpréter au plus juste la réalité pour essayer d’atteindre un certain type de vérité. Rosi démonte un échafaud complexe et donne à voir le portrait vertigineux d’une société rongée par la violence et la corruption. Une société qui se cherche désespérément des héros. Vingt-six ans après l’Italien, l’Américain Michael Cimino traitera à son tour le cas Giuliano dans un style baroque et lyrique, ne retenant rien de la leçon de cinéma de Francesco Rosi.
Cinémathèque de Toulouse
69 Rue du Taur, ToulouseCINEMA: "Le Terroriste" (Il terrorista) / Gianfranco De Bosio.
at 19:001963. It / fr. 100 min. N&b. 35 mm. VO. Sous-titrage informatique en français. Avec Gian Maria Volontè, Philippe Leroy, Giulio Bosetti, Raffaella Carrà. Histoires de cinéma 1
La fin des mythes et les débuts de la réflexion. Un film inspiré par des faits authentiques et personnels vécus par le réalisateur Gianfranco De Bosio. Venice, hiver 1943. La Résistance italienne prépare un attentat contre le siège de la Kommandantur allemande. Un homme surnommé l’Ingénieur y joue un rôle déterminant. Bien que l’explosion soit meurtrière, elle n’atteint pas les cibles désirées (le commandant allemand en réchappe et une prostituée vénitienne y laisse la vie). Le lendemain, les autorités réagissent en menaçant de fusiller des otages si l’Ingénieur n’est pas livré… Au début des années 1960, in Italy, on assiste à une recrudescence de films qui traitent directement des problèmes de la Résistance dans l’immédiat après-guerre. La ragazza de Luigi Comencini, Le Bossu de Rome de Carlo Lizzani ou encore Une vie difficile de Dino Risi, s’éloignent de l’exaltation des faits pour se placer dans une perspective critique des événements.
Relire un moment de l’histoire italienne ensevelie sous les discours officiels, dépasser la chronique héroïque pour en arriver à une vision plus ample du problème, tel était le but du mouvement. Le Terroriste est donc tout à la fois un film d’action et de réflexion qui deale intelligemment et sensiblement avec des espérances déçues. Une œuvre au style dépouillé qui grave dans un beau noir et blanc des moments où l’initiative personnelle vient parasiter la politique politicienne. « Je n’ai pas voulu écrire une histoire spécifiquement italienne mais traiter un cas général, valable dans tous les pays et placer au centre du problème des rapports entre l’action et la morale, entre l’action politique pure et l’activité de guerre et de résistance. Je n’ai pas voulu faire une épopée révolutionnaire mais plutôt un film de réflexion idéologique et morale. » (Gianfranco De Bosio,/ Les Lettres Françaises, 06/06/1964).
Séance présentée par Régis Debray