Né en 1931, il passait pour un des derniers grands maîtres du cinéma italien, réalisateur de chefs-d’œuvre mettant en scène Marcello Mastroianni, Sophia Loren, Vittorio Gassman ou Nino Manfredi. Il avait notamment signé Nous nous sommes tant aimés (1974), Une journée particulière (1977) ou encore La Famille (1987).

En quarante ans de carrière, le réalisateur a mis en scène près d’une quarantaine de films. Son style est reconnu pour son audace et sa singularité.

Il mêle acuité de l’analyse psychologique, caricature féroce des sociétés modernes, ironie, farce, désenchantement, mélancolie et recherches narratives et formelles inédites. Primé à plusieurs reprises aux Césars comme à Cannes ou encore à la cérémonie des Rubans d’argent, le cinéaste laisse derrière lui de grands chefs d’œuvre du septième art.

Retour sur dix de ses longs métrages, qui ont marqué l’histoire du septième art:

  • Parlons de femmes (1964)

Se permettete parliamo di donne, réalisé en 1964, est le premier long-métrage d’Ettore Scola, qui avait jusque-là signé que des scénarios, notamment pour Dino Risi. La mode était alors celle du film à sketches. De nombreux cinéastes italiens avaient œuvré dans ce genre, et pas des moindres, puisque Fellini, Visconti, De Sica et Monicelli s’étaient associés deux ans plus tôt pour le très célèbre film Boccace 70.

Ici, Ettore Scola est seul aux commandes. Il dirige l’acteur Vittorio Gassman, qui interprète le personnage central dans les neufs sketchs. Intitulé originalement Se permettete parliamo di donne, le film met en lumière les difficultés des relations entre hommes et femmes.

  • Nous nous sommes tant aimés (1974)

L’histoire se déroule en 1944. Gianni, Nicola et Antonio se lient d’amitié alors qu’ils ont pris le maquis pour combattre les Allemands. Lorsque sonne l’heure de la libération, un monde nouveau s’offre à eux. Militants fervents, pleins de rêves et d’illusions, les voici prêts à faire la révolution.

Alors que tous trois, à des périodes différentes, vont avoir une aventure avec Luciana, aspirante actrice, la vie les sépare après la chute du régime fasciste et l’avènement de la République. Gianni, avocat en quête de clients, épouse Elide, la fille d’un grossier parvenu, puis se retrouve veuf. Nicola, qui se vouait à être critique de cinéma, devient enseignant en province où il abandonne sa famille pour Rome. Antonio restera brancardier dans un hôpital romain mais lui finira par épouser Luciana.

Par hasard, tous trois se rencontrent mais la communication entre eux est devenue bien différente de celle de leur jeunesse: «Nous voulions changer le monde, mais le monde nous a changés!», déclare l’un des protagonistes…Le film est explicitement dédié au réalisateur italien Vittorio De Sica, décédé d’un cancer du poumon le 13 novembre 1974.

  • Affreux, sales et méchants (1976)

Lors de la 29e édition du Festival de Cannes, le long-métrage remporta le Prix de la mise en scène en 1976. Le film fut presque entièrement tourné à Rome, dans le quartier de Monte Ciocci, d’où l’on aperçoit la coupole de la basilique Saint-Pierre. Cette zone fut véritablement occupée, jusqu’en 1977, par des taudis habités par des chômeurs et par des ouvriers travaillant dans les chantiers des quartiers voisins. Dans un premier temps, Ettore Scola comptait faire un documentaire sur ce sujet. Il décida plutôt d’aborder le sujet sous forme d’une comédie de fiction.

Le film raconte la vie quotidienne d’une famille du quart-monde, originaire des Pouilles, dans un bidonville de Rome au début des années 1970. Une vingtaine de personnes — parents, enfants, leurs conjoints ou amants, petits-enfants, et la grand-mère — s’entassent dans un sordide taudis, vivant de larcins et de prostitution, sous l’autorité tyrannique du patriarche borgne, Giacinto Mazzatella (Nino Manfredi), avare et brutal.

Celui-ci possède une liasse d’un million de lires, reçues en indemnité pour avoir perdu l’usage d’un œil. Il est obsédé par la crainte qu’un de ses proches puisse lui dérober le magot. Il s’entiche d’une prostituée obèse, commence à dépenser son argent avec elle, l’invite même à venir habiter chez lui, ce qui attise la colère de son épouse. Celle-ci, pour laver l’affront, organise avec toute la famille l’assassinat du mari et père indigne.

  • Une journée particulière (1977)

Sorti en 1977, Una giornata particolare se déroule en pleine période fasciste italienne, où on assiste à la rencontre de deux êtres que tout semble séparer: Antonnietta, incarnée à l’écran par Sophia Loren et Gabriele, joué par Marcello Mastroianni.

À Rome, le 8 mai 1938, Hitler rencontre Mussolini. Tous les Romains ont déserté leurs habitations pour aller assister à la cérémonie. Dans un grand immeuble, Antonietta, en bonne mère de famille nombreuse (conformément à l’endoctrinement mussolinien: un mari tout ce qu’il y a de plus machiste et six enfants), est contrainte de rester à la maison pour s’occuper des tâches ménagères alors qu’elle serait bien allée voir le Duce comme tout le monde.

Le hasard va la mettre en contact avec un homme esseulé qu’elle a aperçu dans un appartement de l’autre côté de la cour. Il s’agit de Gabriele, un intellectuel homosexuel qui, pour cette raison, a été exclu de la radio nationale où il était présentateur et est menacé de déportation.

  • La Terrasse (1980)

Ettore Scola s’entoure pour réaliser ce film d’acteurs de renoms tels que Jean-Louis Trintignant, Marcello Mastroianni ou encore Serge Reggiani. Ils incarnent des amis de longue date, appartenant au milieu de la gauche culturelle, qui se retrouvent pour une rituelle soirée-buffet sur la vaste terrasse romaine de l’un d’entre eux. La caméra se promène et surprend des conversations puis, suit un personnage dans sa vie, avant de revenir à la soirée et d’en suivre un autre. L’enthousiasme de la jeunesse a laissé place à l’amertume et aux constats d’échecs, autant professionnels que sentimentaux.

Le long-métrage suit successivement Enrico, scénariste à court d’inspiration, Luigi, journaliste que sa femme quitte, Sergio, un fonctionnaire de la RAI, la télévision publique, anorexique et déprimé, Amedeo, producteur de cinéma, et Mario, député communiste qui va avoir une liaison.

  • Passion d’amour (1981)

Présenté au 34e Festival de Cannes, en 1981, le long-métrage est adapté de Fosca, le plus célèbre roman d’Iginio Ugo Tarchetti, paru sous la forme d’un feuilleton dans la revue Il pungolo en 1869, puis publié dans un volume la même année.

Il est l’un des romans les plus représentatifs de Scapigliatura, ce mouvement littéraire contestataire du nord de l’Italie autour des années 1860. Le film, fidèle au livre dans l’ensemble, en modifie la fin, dont il accentue l’effet dramatique. Plus encore qu’une réflexion sur la beauté et l’amour, livre et film décortiquent le mécanisme de la passion. Bernard Giraudeau et Laura Antonelli jouent les rôles principaux.

  • La Nuit de Varennes (1982)

Le film est inspiré du roman de Catherine Rihoit, La Nuit de Varennes ou l’Impossible n’est pas français. Il raconte la fuite et l’arrestation à Varennes du roi Louis XVI et de sa femme, Marie-Antoinette. À Paris, en juin 1791, l’écrivain libertin Restif de La Bretonne (joué par Jean-Louis Barrault) est le témoin du départ, en pleine nuit et depuis le Palais Royal, d’un mystérieux carrosse.

Intrigué, l’écrivain se lance à sa poursuite en compagnie de Giacomo Casanova. Il découvre bientôt que ce carrosse tente d’en rejoindre un autre parti plus tôt et dont les occupants ne sont rien de moins que les membres de la famille royale…

  • Le Bal (1983)

Le film remporte en 1884 de nombreuses récompenses: César du Meilleur film, César du Meilleur réalisateur mais aussi César de la Meilleure musique de film pour la bande-son signée Vladimir Cosma.

L’histoire se déroule dans une salle de bal où redéfile toute l’histoire de la France: des années 20 aux années 80. Au gré des musiques qui ont rythmé ces décennies comme le jazz, le rock’n’roll ou encore le disco, le Front Populaire, la Seconde Guerre mondiale, la Libération et Mai 68 sont ainsi évoqués.

  • Le Dîner (1998)

Ettore Scola met à l’honneur l’actrice française Fanny Ardant dans La Cena. Elle y campe le rôle de Flora, propriétaire d’un restaurant chic, situe au cœur d’une grande ville, qui pourrait être Rome. Cette dernière aime secrètement un intellectuel et est aimée tout aussi secrètement par un de ses serveurs. Elle reçoit, ce soir-la, une quarantaine de clients de milieux et d’intérêts divers qui chacun à sa table raconte une histoire.

  • Concurrence déloyale (2001)

L’une des dernière réalisations d’Ettore Scola. Concurrence déloyale, sorti en 2001, se déroule à Rome, dans les années 30. Il raconte l’histoire d’Umberto et de Leone, deux commerçants en confection dont les boutiques et les appartements sont voisins. Ils se livrent à une concurrence sans merci et se détestent ouvertement. Pourtant leurs deux fils sont amis, et la fille de Leone et l’aîné d’Umberto sont amoureux l’un de l’autre. Pendant ce temps, les fascistes sont au pouvoir.

Soucieux avant tout du bon fonctionnement de son commerce, Umberto collabore mollement avec le régime, malgré les reproches de son frère, Angelo, un professeur de collège. Un jour, une nouvelle dispute entre Umberto et Leone tourne à la bagarre. Ils sont emmenés au commissariat. Là, on suggère à Umberto de jouer sur le fait que Leone est juif pour lui attirer des ennuis. Umberto refuse…